les dernières heures avant l’horreur

les dernières heures avant l’horreur



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Le procès des attentats du 13 novembre 2015 a atteint ce lundi 28 mars le 100ᵉ jour d’audience. 100 journées durant lesquelles la Cour d’assises spéciale de Paris a entendu les victimes, s’est attachée à la vie et au parcours des accusés, les a entendus sur les préparatifs des attaques de Paris et Saint-Denis avant d’en arriver cette semaine à cette journée fatidique du 13 novembre 2015. Ce lundi, un enquêteur français est revenu sur l’arrivée des terroristes en région parisienne. Compte-rendu d’audience, Nathanaël Vittrant.

« Avec tout le respect que j’ai pour l’armée, c’est un fonctionnement militaire. » À la barre, l’inspecteur de la section antiterroriste de la brigade criminelle décrit l’organisation méthodique de la cellule, le trajet vers Paris des trois voitures, le cloisonnement des communications entre les différents commandos et les organisateurs restés en Belgique, l’utilisation de lignes téléphoniques uniques achetées pour l’occasion. Une fois arrivés en région parisienne, les commandos se répartissent entre une maison louée à Bobigny et une chambre d’hôtel plus au sud à Alfortville.

Sur les écrans de la salle d’audience défilent les photos des lieux, quelque peu retournés puisque les unités spéciales sont passées par là pour s’assurer que ne subsistait aucun danger. On retrouve les restes d’une commande de pizza, des boîtes de thon, tristes derniers repas des aspirants au martyr. À Bobigny : des capuchons d’inflammatteurs électriques et des lambeaux de tissus rouges dont on sait qu’ils ont servi à confectionner les ceintures d’explosifs. 

Archives RFI Procès des attentats du 13-Novembre

Derniers repérages et passage mystérieux à Roissy

L’inspecteur évoque aussi ce trajet de repérage dans l’après-midi du 13 novembre à proximité des lieux des attaques qui auront lieu quelques heures plus tard. Un véhicule passe du côté de la place de la République, remonte au nord de Paris et s’arrête près de 45 minutes à l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle. Pour y faire quoi ? L’enquête n’a pas permis de le savoir, il faut se contenter d’hypothèses.

« D’expérience, dit l’enquêteur, dans les affaires de grand banditisme, ça arrive que des voitures ventouses (des véhicules stationnés de manière prolongée à un endroit donné, ndlr) servent à stocker des armes ou du matériel. » La cellule aurait aussi pu se rendre à l’aéroport pour récupérer quelqu’un. Dernière hypothèse, l’aéroport avait été envisagé comme une cible d’attentat. Un papier retrouvé dans un des véhicules sur lequel était griffonné « place de la République / stade de France / aéroport Charles de Gaulle » est le seul élément matériel permettant de l’étayer. 

Départ précipité et retour à Bruxelles de Mohamed Abrini

Et puis il y a ce départ précipité de Mohamed Abrini dans la nuit du 12 au 13 novembre. Quelques heures à peine après être arrivé dans ce qu’il décrira lui-même comme le « convoi de la mort », il appelle un taxi depuis un restaurant situé près de la planque de Bobigny. Au départ il veut rejoindre la gare pour rentrer en Belgique, quand le conducteur l’informe qu’à minuit passé il n’y a plus de train, les deux hommes négocient pour qu’il le ramène directement à Bruxelles. Au même moment, Bilal Hadfi, le plus jeune des terroristes, 20 ans à peine en 2015, change de planque, passe de la chambre d’Alfortville à celle de Bobigny.

Là encore, la Cour émet des hypothèses : face au désistement d’un de ses membres, la cellule a-t-elle changé ses plans et transféré Hadfi d’un commando à un autre ? Y aurait-il dû y avoir initialement non pas trois mais quatre terroristes au Bataclan ? « Sans établir de hiérarchie entre les victimes, répond l’inspecteur, on voit bien que la cible principale, c’était le Bataclan. Les autres cibles sont frappées avant, pour détourner les forces de police et les secours. Donc, c’est possible, pour parler en termes militaires, qu’ils aient prévues d’y déployer le gros des effectifs. »

C’est au tour de Me Marie Violleau, l’avocate de Mohamed Abrini d’interroger l’enquêteur. « La semaine dernière, monsieur Abrini a dit pour la première fois depuis 6 ans qu’il était prévu pour faire partie de ce commando du 13-Novembre. Est-ce que ça vous paraît cohérent ? » L’inspecteur hésite un instant. « J’ai envie de vous dire oui. Il participe à toutes les démarches préparatoires aux attentats, pour moi qu’il soit partie prenante, oui, c’est cohérent. » Justement, ce mardi, c’est Mohamed Abrini qui aura la parole. 



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Author: Shirley